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365 jours en Bourgogne

Un peu d'air frais

17 Septembre 2011 , Rédigé par Laurent Gotti Publié dans #Ailleurs

Un vent venu du Québec ne peut-être que rafraîchissant. Le magazine Cellier fête ses 5 ans et se penche sur la Bourgogne. Rencontre avec Marc Chapleau son rédacteur en chef.

Chapleau.jpgQu’un homme me confesse son "grand amour" pour la Bourgogne et me vient une envie spontanée de le prendre en sympathie ! Surtout quand il débarque chez vous, depuis l'autre rive de l'océan, et cite quelques noms de "climats" comme autant de sources d'enchantements…  Réflexe chauvin et narcissique sans doute. Saine curiosité journalistique aussi. De celle qui me porte à m'interesser plus longuement au parcours et au discours de la personne en question.

Cet homme s'appelle Marc Chapleau, il est rédacteur en chef de Cellier, le magazine de la Société des Alcools du Québec (monopole de distribution des vins chez nos cousins du nord de l’Amérique). Vous lirez, avec appétit, son édito dans le numéro qui vient de paraître (entièrement consultable en ligne) pour en savoir davantage. Nous nous sommes rencontrés en avril dernier par une belle soirée de printemps, autour d'un simple repas familial. Et quelques bonnes bouteilles tout de même… Il préparait les articles parus dans ce numéro d'automne. L'air de rien, Marc Chapleau sait soumettre son interlocuteur à la question, le faire passer à table (en l’occurrence la mienne ce soir là). Il vous suit même, à ses risques et périls, dans la cave.

Mais l'essentiel n'est pas là, Marc Chapleau m'avait laissé quelques exemplaires des parutions récentes de Cellier. Et le plaisir de la joyeuse soirée s'est poursuivi les jours suivants. Je dois confesser à mon tour : il y a longtemps que je n'avais pas pris autant de plaisir  à lire des articles sur le vin.

Le ton à la fois réfléchi, sans se prendre trop au sérieux, accessible, très "incarné" par une belle dimension d'humanité, m’a conquis... Mais, mon plaisir était un peu vexé tout de même. Pourquoi ce ton rafraîchissant est-il si souvent absent dans notre presse spécialisée nationale ? 

Cellier-SAQC'est vrai, pour nous Français, s'exprimer sur le vin va vite de paire avec l'affirmation d'un statut social. Il s'accompagne souvent aussi d'une propension à intellectualiser et peut même rapidement tourner à l'exercice d'expert. Ou pire apporter l'occasion à certains égos hypertrophiés de s'en donner à cœur joie. Quand l'égo en question est celui d'un journaliste, sommelier, œnologue, etc., la faute professionnelle n'est jamais loin. Les non-initiés restent en rade. Ces messieurs "je-vais-vous-dire-ce-qui-est-bon" passent finalement à côté de leur rôle essentiel : celui de médiateur et d'éveilleur de passions (avant leur fonction de prescripteurs).

Bien à l'inverse de cet écueil, sous certaines réflexions ou "angles" d'articles de Marc Chapleau affleurent de sains questionnements sur le rôle du journaliste. Je vous livre un propos recueilli par Marc auprès d’Eric Asimov, critique vin du New-York Times (Cellier n°15). Prise de position à laquelle il adhère totalement, j’en suis sûr :

"Je vous dirai d’abord que ces dernières années, on parle du vin dans ce pays beaucoup trop sérieusement (Ndla : dans le cas présent il s’agit des Etats-Unis !), comme si on mettait la pression sur les gens pour qu’ils s’y intéressent à fond, au lieu simplement de les inviter à boire et à apprécier. Le discours entourant les accords mets-vins est ainsi souvent beaucoup trop alambiqué. Or pourquoi vouloir rendre le vin plus intimidant qu’il l’est déjà, par sa complexité. (…) Cela dit, je ne suis pas de ceux qui vous diront qu’on peut facilement démystifier le vin et en faire prestement le tour. Si vous voulez devenir un tant soit peu connaisseur, il faut étudier, prendre le temps, déguster souvent, comparer, etc. C’est comme apprendre à jouer au golf : impossible d’y parvenir simplement en lisant un manuel ou même deux ou trois bouquins."

Pour finir, une autre phrase également rapportée par Marc Chapleau (Cellier n°17). Elle est cette fois de Claude Langlois, chroniqueur au Journal de Montréal :

"Sois-toi même et tu seras universel – ça vaut pour les vignerons, pour les chroniqueurs du vin aussi".
N’est ce pas l’esprit qui préside (ou devrait présider) à l’affirmation de nos « climats » bourguignons ? L’explication de leur succès, par-delà même les océans…

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